*bandeau*

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Parmi les nombreux livres inspirés par Dumas et son œuvre, celui-ci est sans doute l’un des plus surprenants – à défaut d’être parmi les meilleurs. Sa structure complexe, une certaine irrationalité et de nombreuses incohérences en rendent le résumé particulièrement difficile. Essayons tout de même.

Le premier niveau du roman porte sur l’histoire d’une famille de Noirs américains contemporains. Elle est évoquée par une succession de scènes parfois séparées par plusieurs années et sans lien direct entre elles.

L’histoire commence au Vietnam, au tout début de la guerre. On y voit le major Alexander Palletree, jeune militaire à la brillante carrière, le Noir le plus gradé de l’armée américaine, pratiquer un hold-up, apparemment pour mettre sa famille à l’abri du besoin. A la suite de quoi il meurt, mystérieusement assassiné.

Il laisse à son fils l’«Epée du Maure», qui vient en droite ligne de son ancêtre Alexandre Dumas. Car il est un «Palletree», nom que l’auteur utilise de bout en bout pour désigner la famille de Dumas, au lieu du vrai nom, Davy de la Pailleterie.

L’histoire se déplace ensuite vers la femme du major, Veronica, et son fils, Victor Alexander. La préoccupation principale de Veronica semble être de transmettre au jeune Victor l’héritage moral et spirituel qui s’attache à la lignée Dumas/Palletree et à l’Epée, et qui remonte à 10.000 ans, à Troie, aux rois d’Ethiopie, etc., incarnant la glorieuse histoire du peuple noir.

Jeune homme, Victor fait un bébé à sa petite amie blanche qui, sans que l’on sache pourquoi, ne lui dit pas qu’elle est enceinte et en épouse un autre. Des années plus tard, Victor est entrepreneur dans les hautes technologies. Il met au point un procédé de réalité virtuelle très prometteur qu’il teste en fabriquant une sorte de jeu de rôle basé sur Les trois mousquetaires. Le père de son ancienne petite amie (qui ignore leurs relations) cherche à l’évincer de la direction de la société.

Il renoue avec la fille et, sous l’impulsion de sa mère Veronica, entreprend de jouer enfin son rôle de père vis-à-vis de son jeune fils. Sa petite famille est traquée par des affreux qui veulent récupérer un coffre plein de papiers mystérieux…

En parallèle à cette intrigue contemporaine, le texte comprend des extraits du journal de la marquise Marguerite de la Palletree, cousine et contemporaine d’Alexandre Dumas, journal en possession des descendants américains de la famille. Elle y évoque différents aspects de la vie de celle-ci: comment l’Epée du Maure a été donnée par Louis XVI au marquis de la Palletree quand il l’a exilé aux Caraïbes; la vie d’Alexandre Dumas, dans son château de Monte-Cristo notamment; et encore et toujours la grande tradition de l’héritage immémorial de la famille, faite d’Honneur, de Justice, de Vérité…

Selon cette tradition, le mâle de la famille en vie à une époque est le «dernier mousquetaire» (d’où le titre du livre), jusqu’à son remplacement par la génération suivante. Une tradition grandiose qui n’empêche nullement, il faut le noter, les «derniers mousquetaires» de voler, de négliger leurs enfants, etc…

 

Peu cohérente, cette intrigue est rendue encore moins lisible par toutes sortes de bizarreries. Certaines sont très anecdotiques, mais bien surprenantes. Il en va ainsi des nombreuses déformations de noms français. Pailleterie, on l’a vu, est remplacé par Palletree. Mais ce n’est pas tout: d’Artagnan devient d’Artagnon; Alfred de Vigny devient de Vichy ; Villers-Cotterêts, ville natale de Dumas, se transforme en Villiers-Coterie. Les fautes de ce genre sont si nombreuses que l’on se demande parfois si elles ne sont pas volontaires. Mais elles ne sont pas non plus systématiques – bien d’autres noms français sont bien orthographiés – et l’on ne voit aucun explication pour des déformations volontaires.

Dans le même ordre d’idée, de nombreuses aberrations apparaissent dans la description de la France ou de son histoire. Par exemple, le château de Monte-Cristo bâti par Dumas est décrit comme tellement immense qu’on le voit depuis Paris (enfin, peut-être s’agit-il là d’une licence poétique).

La plus extrême confusion prévaut également en ce qui concerne les origines de Dumas. L’auteur ne semble pas faire clairement la différence entre les Dumas et les «Palletree». Très curieusement, les héros du livre répètent inlassablement qu’ils sont «un Palletree et un Dumas». Même confusion en matière de race: Smith a l’air de penser que la famille Palletreee, tout comme la famille Dumas, est noire. Et qu’Alexandre Dumas est ainsi une sorte de héros de la race noire.

A la fin de ce bien étrange roman, on peut se raccrocher à quelques brefs éléments communiqués sur l’auteur dans l’habillage du livre. On y apprend que Smith s’est inspiré «des relations de famille réelles» d’Alexandre Dumas. Et que son héros Victor «est, comme Dumas et Smith, le produit de familles brisées et de relations paternelles disloquées».

L’impression qui prévaut est donc que Smith est tombé sur une biographie de Dumas, dont il aura retenu quelques éléments concernant l’histoire du marquis de la Pailleterie, du fils qu’il a eu avec une esclave noire (qui deviendra le père d’Alexandre Dumas), et peut-être aussi des relations difficiles entre Dumas père (auteur des Trois mousquetaires) et Dumas fils (auteur de La dame aux camélias).

A la suite de quoi il aura écrit ce roman où l’on devine de douloureuses expériences personnelles en matière de relations père/fils, ainsi qu’un désir poignant de «réhabilitation» des origines des Noirs américains.

 

Extrait du chapitre 3

(lettre posthume du major Alexander Palletree concernant l’éducation de son fils Victor)

(...) I’m not sure where I am right now, but I know that by this time I am beyond where you can contact me, or worse, I'm dead. Whatever the case, I have left you all the account information as we planned, and my sword, the Sword of the Moor. Inside the sword's black case you will find documents and letters that tell my son everything about himself. I beg you Stephen to somehow contact Jacques and give my son, Victor Alexander, the sword along with the letters when he changes into manhood. Pledge to me a posthumous vow that you will give my son his heritage as I was given mine. He is a Moor, a Palletree and a Dumas, a Last Musketeer. His lineage is not that of a slave in America, but that of Ausar and Auset, and Memnon, King of the Ethiopians. With this sword he will go forward in his life, and with the knowledge of who he is, a defender of Egypt, Ethiopia and Troy, he will himself conquer life. Do this for me Stephen, in honor of our friendship and brotherly love. When you see Veronica and Victor, give them the legacy of the Last Musketeer. Tell them as Memnon told Hector at Troy, and Memnon VIII told the court of King Louis: "Remember that riches and gold pale when compared to the treasure born within you, buried within your soul. The Sword of the Moor represents the first and the last, the beginning and the end, the legacy of gods. Always trust that treasure that is buried within you. That is the legacy of our People of the Kamit." Everything about the sword and its legacy is contained in a diary which I've left you. Give this to my son as well. The two are inseparable. Thank you my friend, and goodbye. Care for my family as I would. In the fullness of time, we may see each other again, in this world or another.

With all my gratitude, your brother,

Alex

 

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