*chapeau*
Cela devait arriver: ayant vécu près de 200 aventures
réparties sur une période de 50 ans, Bob Morane, chevalier
des temps modernes, a rendu hommage à son modèle historique,
d’Artagnan.
Le début de ce court récit, publié en complément
d’un Dictionnaire des personnages (recensant tous les personnages
qui apparaissent dans les nombreux volumes consacrés au héros),
voit Bob Morane sollicité par un ami historien pour présider
une exposition consacrée à d’Artagnan, qui se tient à Sarlat.
Pièce maîtresse de la manifestation: la fabuleuse épée
réalisée à la demande de Louis XIV à la mort
de son mousquetaire préféré pour honorer sa mémoire,
et qu’il avait offerte à la famille de d’Artagnan.
Montré en public pour la première fois, cet objet inestimable
est volé dès la nuit suivant l’inauguration.
Bob Morane mène l’enquête en commençant par
les archives locales. De fil en aiguille, il en arrive à la conclusion
que le vol de l’épée a été commandité par
le descendant d’un seigneur local qu’une violente rivalité avait
opposé au mousquetaire. Ce dernier l’avait emporté,
et le seigneur avait vu son château brûlé par les soldats
de Louis XIV. Un affront que son lointain descendant a donc voulu venger.
Bob Morane trouve alors un repaire caché dans les ruines du château,
qui a été restauré en secret, et récupère
bien sûr l’épée après avoir affronté divers
affreux.
Comparé aux nombreuses autres aventures palpitantes du héros
d’Henri Vernes, ce récit est bien mineur, avec une intrigue
qui tient difficilement debout. Il n’en sera pas moins apprécié des
générations qui, depuis 50 ans, ont suivi avec passion les
aventures échevelées de Bob Morane et de son ami Bill Ballantine
(qui n’apparaît pas dans cette histoire), pour le clin d’œil
rendu par le héros contemporain à son modèle historique.
Car la filiation entre le héros de Dumas et celui de Vernes est
directe: qu’il lutte contre des trafiquants d’opium ou
l’abominable Ombre Jaune, Bob Morane est d’un courage à toute épreuve,
d’une énergie inépuisable et d’un attachement
sans faille à ses amis!
Extrait du chapitre 2
L'inauguration s'était admirablement passée. La salle d'exposition
avait eu du mal à contenir près de trois cents personnes
et Bob Morane s'était senti ému au moment de couper le ruban.
Voir son nom associé à celui de d'Artagnan ne pouvait le
laisser indifférent. D'autant que, au temps des lectures de sa jeunesse,
cet impétueux Gascon, futur Mousquetaire, avait bercé ses
premiers rêves d'aventure à travers la transposition
qu'Alexandre Dumas en avait faite.
Une fois le ruban coupé, Bob s'était promené dans
les travées et arrêté devant plusieurs vitrines.
Il avait été surpris par celles consacrées aux adaptations
cinématographiques de l'illustre roman. On en comptait plus d'une
centaine, chiffre quasi incroyable. Et la première remontait à 1898,
aux balbutiements du cinéma. Combien en avait-il vu dans ce
lot? Probablement pas plus d'une demi-douzaine. La seule qui lui
fût revenue en mémoire était celle avec Gene Kelly.
Une version bondissante mais un peu trop hollywoodienne à son goût.
D'autres vitrines proposaient des objets d'époque évoquant
la vie quotidienne d'un mousquetaire en campagne. Plusieurs mousquets rappelaient
qu'ils avaient donné leur nom à ce célèbre
régiment. Ils ressemblaient à des fusils, et leur précision
ne devait pas excéder les dix mètres. Mais, comme tout le
monde. Bob s'était attardé au centre de la pièce pour
contempler le joyau de l'exposition: l'épée de d'Artagnan.
Cette fois c'était la vraie, Charles de Rouffignac le lui avait
garanti. À première vue, les différences étaient
minimes. Et pourtant de celle-ci se dégageait une émotion
particulière, un plus indéfinissable. S'il avait considéré la
copie comme «magnifique», Bob ne pouvait que qualifier l'originale
de «splendide», au bas mot. Et puis, le fait de se retrouver
face à un objet offert par le roi Louis XIV à l'un de ses
plus courageux guerriers provoquait en lui un petit pincement au cœur.
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