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All for one
A gender-bent take on The three musketeers

Sophia Beaumont

330 pages
Autoédition - 2018 - États-Unis
Roman

Intérêt: **

 

 

Cette transposition des Trois mousquetaires présente deux particularités : les quatre mousquetaires sont des femmes ; le récit se déroule dans une Histoire parallèle, un Québec indépendant où règne une descendante de Marie-Antoinette.

Dans l’univers créé par Sophia Beaumont (voir son site Web), cette reine de France a fui le pays pendant la Révolution et s’est réfugiée au Québec. Elle a mené à bien l’indépendance de la région qui est devenue ce que l’auteure nomme curieusement « la République du Québec, une monarchie constitutionnelle ». De fille en fille, plusieurs reines se sont succédées, et c’est une descendante de Marie-Antoinette, Marie Constance, qui est sur le trône en 1862, quand se déroule le roman. Cette lignée de reines a assuré la mise en place d’un Etat qui garantit l’égalité des droits des femmes et des hommes. Même si la reine n’exerce pas le pouvoir politique, elle est immensément respectée et son influence est forte. Elle est protégée par les Gardes de la Reine, un corps d’élite entièrement féminin dont les membres sont également connus sous le nom de « mousquetaires ».

L’histoire commence avec l’arrivée dans la capitale Montréal de Louise Drapeau, jeune fille qui rêve d’intégrer le corps des Gardes de la Reine auquel sa mère appartint jadis. Elle devient rapidement amie de trois mousquetaires, Athena (Athos), Portia (Porthos) et Arabella (Aramis), au gré de circonstances décalquées sur Les trois mousquetaires.

Louise découvre accidentellement l’existence d’un complot contre la reine. Car la situation politique du Québec est complexe. Le Premier ministre est le cardinal Lefebvre, représentant les intérêts de l’église catholique, qui n’approuve guère les tendances libérales de Marie Constance. Surtout, la guerre de Sécession fait rage aux Etats-Unis voisins, où les deux camps aimeraient s’assurer l’appui de l’Etat du Québec. En outre, l’Angleterre intrigue pour préserver son influence dans la région.

Louise et ses trois amies cherchent donc à protéger la reine contre les complots montés par un certain lord de Winter (qui se révèlera être l’ancien mari d’Athena), dont on ne sait pas trop s’il travaille pour le compte du cardinal, des Sudistes, des Anglais ou de tous à la fois. Après l’échec d’une tentative d’assassinat contre elle, Marie Constance charge les quatre mousquetaires d’aller protéger le président nordiste Abraham Lincoln qui est lui aussi menacé. Louise et Athena embarquent dans un ballon muni d’hélices inventé par Athena, accompagnées de Robert Lincoln, fils du président américain qui se trouvait en visite à Montréal. Une expédition pleine de péripéties et de dangers (le ballon n’est pas encore au point…) qui les mène finalement à Washington. Louise sauve Lincoln d’un assaut lancé par Winter et ses hommes. De retour au Québec, elle est récompensée de ses exploits en étant nommée sergent chez les Gardes de la Reine.

 

Ce remake du roman de Dumas est intéressant à bien des égards. Il s’agit fondamentalement d’une interprétation féministe : ce choix se manifeste bien sûr par le changement de sexe des mousquetaires mais aussi plus largement par le cadre historique imaginé par Sophia Beaumont. Son idée d’un Québec indépendant dirigé par des reines est amusante et tient bien la route (à condition d’admettre Marie-Antoinette dans le rôle d’une bâtisseuse de Nation !).

La question de la place de la femme dans la société est omniprésente dans le roman. Si les femmes bénéficient d’une égalité théorique dans ce « Québec libre », l’égalité réelle demeure un combat permanent. Cela se voit par exemple dans l’attitude des « gardes du cardinal » (tous des hommes) envers les Gardes de la Reine (toutes des femmes).

Le voyage de Louise aux Etats-Unis permet aussi à cette dernière de constater de première main ce qu’est la place des femmes au XIXème siècle dans une société moins évoluée que celle de son pays natal : l’indépendance, la liberté d’allure et les initiatives de Louise lui valent d’être sans cesse critiquée et soupçonnée par des hommes peu habitués à un tel comportement.

Ce discours féministe n’est pas pour autant pesant ou dogmatique. Les mousquetaires ont beau être des guerrières intrépides, maniant aussi bien l’épée que le revolver, elles adorent, quand elles ne sont plus en service, enfiler les toilettes affriolantes des dames de la Cour.

Les personnages principaux sont calqués de près sur ceux de Dumas avec quelques variantes intéressantes. Portia (Porthos) appartient à une grande famille de la nation indienne. Athena, dont on apprend qu’elle descend de la famille des comtes de La Fère, prend aussi un relief particulier du fait de sa passion (très peu féminine) pour la science et les inventions. Sans équivalent direct chez Dumas, la reine Marie Constance est une réussite : elle a beau être une monarque constitutionnelle, en principe sans pouvoir réel, elle n’en a pas moins un sens politique aigu, une volonté d’acier, le tout enrobé dans une beauté, un charme et une élégance sans pareils. Au point qu’il est suggéré à la fin que Louise, totalement subjuguée, pourrait bien nouer une idylle avec sa souveraine (ce qui expliquerait sans doute le deuxième prénom de cette dernière)…

L’intrigue suit au début de très près celle des Trois mousquetaires, jusqu’après le duel entre d’Artagnan, les mousquetaires et les gardes du cardinal. Elle diverge ensuite largement avec toutefois des « citations » ici ou là. Quand Louise et ses amies partent pour Washington, seule la première jeune femme y arrive, comme c’est le cas pour d’Artagnan en route vers Londres. De même, le cardinal Lefebvre tente en vain de recruter Louise dans ses gardes comme Richelieu avec d’Artagnan. Autre clin d’œil à Dumas : Winter utilise un code secret basé sur les pages et les lettres de son livre favori, Le comte de Monte-Cristo.

Si All for one est donc plein d’idées intéressantes, le livre souffre malheureusement de quelques faiblesses, en particulier au niveau de l’intrigue. Après avoir bien démarré, l’histoire tourne court : les complots restent plus ou moins en plan et l’on ne sait rien de ce qu’il adviendra des luttes de pouvoir et d’influence qui menacent ce sympathique Québec indépendant.

 

Extrait du chapitre 17 Marching orders

The most striking feature of the room, however, was the sight of Marie Constance in a pale yellow summer day dress, pacing the floor in the center of the room. Her ladies sat on a chaise against the back wall, silent and still, but looking nervous as well. Every once in a while, one would look at the queen, then at her fellows, then stare resolutely back at her hands. As soon as the Musketeer who showed us in was gone and the door shut, the queen stopped her pacing and turned to look at us.

“Is this true? Is it true what Captain Thomas has told me?”

Athena stepped forward, presenting her with the translation of the coded message. “Yes, Your Majesty.” Briefly, she explained what we’d discovered in the past few hours.

The queen let out a sound somewhere between a sigh and a groan of frustration, crumpling the note in her fist.

One of the ladies stood. She was carrying a ledger, held open with a finger. “Your Majesty, we must act quickly. If what they say is true, then there will be pressure to sign the treaty with England and the Confederate States. Unless we have proof to the contrary, there could be protests, even riots.”

The queen looked down at the wad of paper in her hand. “There will be riots if I dismiss Cardinal Lefebvre. And I don’t have the power to remove Captain Rochefort from his position; only the pope or the cardinal can do that. If I have him arrested, the church will be the first to object.” She shook her head. “Can you imagine what would happen if the church denounced me? It would be the Revolution all over again.” For once, I knew she was referring to the French Revolution, and not the one we’d fought ourselves.

It was one thing for a powerful nation like England to part with the church, but even at that they nearly hadn’t survived it. A small country like Québec? She was right — it would be absolute chaos. And it would be no time at all before foreign powers overtook us. Québec might be short on political clout, but not on natural resources. And there was more than one country willing to kill to get them.

“Stop this.” The queen whirled to face the four of us. “Stop this. I charge the four of you with putting a stop to this plot, which endangers peace not only here at home, but abroad as well. Do whatever you have to do to stop them.”

“But Your Majesty, if we are gone —”

“I have a whole platoon of Musketeers at my disposal, Arabella, and Captain Thomas to boot. She has been meticulously testing each of her top soldiers. I will be fine. For the moment, there is another in greater danger. Agathe.”

The woman with the ledger looked up.

“I need an itinerary for Lord de Winter as soon as possible. If he or any of his associates leave the city, I want to know about it.”

Agathe flipped to another page of the ledger. “Your Majesty, Lord de Winter is supposed to leave this evening.”

“By train or boat?”

“I don’t know. I’ll find out.”

“Good. And see to it these women are provided with traveling expenses.”

“Yes, Your Majesty.”

“My queen, about that…” Athena hesitated.

“Yes?”

“I wonder if I might have your permission to — well, it’s nearly complete. It is complete, really, except for the test —”

“Do it. If Lefebvre and Rochefort already have a man on the way to Washington, we must do everything possible to keep up.”

Athena bowed low. We followed her example, and were dismissed.


 

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