A modern Monte Cristo
Fedor Kaul
288 pages 1938 - Allemagne Roman
Intérêt: *
Très directement inspiré du Comte de Monte-Cristo, et le
revendiquant comme le montre le titre, ce roman présente la particularité de
transposer l’histoire d’Edmond Dantès dans un contexte
de montée d’un régime totalitaire dans un pays d’Europe
de l’Est. Et la dénonciation d’un tel régime
est bien le premier objectif de ce livre publié en 1938...
Il est à noter que l’on ne sait rien de Fedor Kaul, pas même
sa nationalité. Il semblerait que le texte anglais ait été traduit
de l’allemand, mais on ne peut être certain de la langue d’origine
du livre.
L’histoire commence dans un pays européen non identifié,
qui évoque notamment l’Allemagne du début des années
30. Le climat politique est tendu car un parti totalitaire, mené par
un redoutable leader, du nom de Rulo, travaille activement à la
conquête du pouvoir. A cette fin, il attise la haine de la population
envers la minorité des Ingolians.
Le héros du livre, Christopher Kinetis, appartient à la jeunesse
dorée de la capitale. Son père, Alexander, est un richissime
industriel qui lui passe toutes ses fantaisies. Mais il appartient au peuple
des Ingolians. Et ses rivaux en affaires montent un complot contre lui.
L’industriel est accusé de toutes sortes de malhonnêtetés
et jeté en prison. Son fils tombe dans la misère et voit
ses anciens amis se tourner contre lui et son père. Un procès
truqué a lieu et Alexander meurt, empoisonné à petit
feu. Christopher s’enfuit.
Passager clandestin sur un cargo, il s’associe à un homme étrange,
Charles Rogers, qui l’emmène sur une île déserte
du Pacifique. Les deux hommes s’y trouvent bloqués pendant
une quinzaine d’années… Rogers se révèle être
parfaitement fou et finit par mourir. Mais il laisse ses papiers d’identité et
a raconté sa vie à Christopher qui peut donc se faire passer
pour son compagnon le jour où un bateau le récupère
sur son île. Or, Rogers se trouve être le seul héritier
d’un énorme groupe industriel américain.
Christopher, devenu Charles Rogers, prend possession de la fortune
de ce dernier et décide de se venger des responsables de la mort de son
père et de la ruine de sa famille. Entre temps, Rulo a pris le pouvoir
et les anciens amis de Christopher – devenus ses ennemis mortels – occupent
tous des positions importantes à la tête de ce régime
dictatorial.
Changeant une nouvelle fois d’identité, Christopher devient
le comte Savanna. Il s’installe dans son pays d’origine, où il
subjugue tout le monde grâce à sa fortune. Petit à petit,
il s’en prend à ses ennemis. L’un d’entre eux
est compromis dans le suicide d’une jeune fille. Savanna prête
de très grosses sommes d’argent au fils du médecin
qui a empoisonné son père et le ruine au jeu, etc…
Surtout, Savanna monte un projet grandiose: engageant de nombreux
savants, il fabrique d’extraordinaires navires et machines capables d’aller
ramasser l’or qui se trouve, affirme-t-il, en grande quantité au
fond des mers…. Expériences concluantes à l’appui,
il convainc le dictateur Rulo de s’engager à fond dans le
projet. Pour financer les gigantesques investissements nécessaires,
Rulo pressure encore plus son peuple – en lui promettant la prospérité.
Mais les expériences de Savanna étaient entièrement
truquées. Il a englouti sa fortune pour monter cette gigantesque
tromperie. Le jour où le scandale éclate, l’opposition – que
Savanna a également organisée en sous-main – balaye
le régime de Rulo. Savanna-Kinetis disparaît, sa vengeance
accomplie.
La trame du livre est donc complètement démarquée
de Dumas. Mal écrit, le roman est très schématique.
Sa relative brièveté fait que les péripéties
s’enchaînent très vite, sans approfondissement des personnages
ou des situations. L’intrigue manque ainsi singulièrement
de cohérence.
Deux éléments sont malgré tout intéressants.
L’énorme escroquerie montée par Savanna, avec ses machines
fantastiques destinées à ramasser l’or au fond des
mers, est amusante, et touche à la science-fiction primitive. Surtout,
l’évocation de l’arrivée au pouvoir du parti
de Rulo est assez frappante, notamment au début du livre, avec la
campagne de haine contre les Ingolians et le procès truqué.
Ces passages, qui peuvent faire penser aussi bien à l’Allemagne
nazie qu’à la Russie soviétique, donnent à penser
que l’auteur a vu ces pratiques de près. Dommage, décidément,
que l’on ne sache rien de lui.
Extrait du chapitre 17
After an absence of more than seventeen years, Christopher came back once
again to his native land. But instead of the young man who had fled in
despair, there returned as the Count Savanna one of the richest men in
the world.
While he was still in America Christopher had tried to get some idea
of what had happened in his own country during his absence. All that he
could
find out was that for more than fifteen years Rulo had held absolute
sway. By promising the people to bring back the Golden Age, he had acquired
a
fanatical following. Nearly all Christopher's former friends had prospered.
Valeno, Dorus and Lorian were ministers of state.
One of the first acts of the tyrant was to carry out a pitiless persecution
of the Ingolians.
"
They don't belong to us," Rulo declaimed at his great mass meetings. " They
have shown themselves unworthy of the citizenship we once granted them."
At first Christopher regarded this persecution with amazement, then
with increasing anger. Still his own fate and desire for revenge
overshadowed all other feelings. It was his conversation with Trenus
which had first
opened his eyes to the fate of the Ingolians and his oppressed countrymen.
He had suppressed his fervent desire to let Trenus know that he was
his
comrade-in-arms. The thought grieved him that this young man had,
in his passion, rushed to his own destruction. But to have warned
him
would have
meant betraying himself.
Count Savanna immediately fulfilled the hopes connected with his
arrival. A few weeks later he gave the order for the building of
a house, for
which he had purchased a tract of land in the neighborhood of the
city. The word
house was a modest description of the palace, for the erection of
which special permission had to be obtained. For the carrying out
of these
formalities, a young officer called Count Nemero was placed at Savanna's
service. The
plans submitted by Savanna's architect were regarded with grave misgivings.
What did anyone want with a palace with four subterranean stories
and only two above ground, provided with a power-house and another
building,
the
purpose of which was not quite clear? Permission was only given
after Nemero had sounded His Excellency. He carried out his task
with great
tact. Savanna who realised quite well that Nemero was really a spy,
foisted onto
him in the pretence of business, willingly supplied the information.
The house was to be constructed on this plan to ensure absolute quiet,
although
it would entail the construction of an expensive ventilation plant.
Indeed Nemero, as well as his future guests, might well be surprised.
Nemero,
flattered, smiled at the thought that he would be invited to Savanna's
house. He knew that the man he was addressing was the multi-millionaire
Rogers. Obedient to orders, he had avoided making any mention of
this knowledge. One learned to obey under Rulo.
Savanna volunteered no information concerning the power-house. The
third building was to be used as a research institute in which his
favourite
study — the examination of the composition of the sea-bottom – was
to be pursued.
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