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A mão do finado
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Merci à Javier La Orden Trimollet de m’avoir procuré ces trois volumes |
La réalité est tout autre. En fait, Dumas a bien connu
ce livre et a déployé d’importants efforts pour
réfuter toute idée qu’il en était l’auteur.
Dès la fin de 1853, il écrit ainsi au Jornal do
Comércio, à Rio de Janeiro, pour expliquer que,
ayant appris que l’on publiait au Brésil A mão
do finado, il voulait préciser que «Je n’ai
jamais fait et, bien qu’on me le demande souvent, je ne ferai
probablement jamais de suite» du Comte de Monte-Cristo.
Et Dumas de demander au journal de démentir qu’il est
l’auteur du livre, information, dit-il, «qui n’a
sans doute pas d’importance pour les autres, mais qui a une
certaine gravité pour moi» (anecdote et lettre citées
dans le livre d’Albino Forjaz de Sampaio).
Dumas aborde également plusieurs fois le sujet en France,
notamment dans une Causerie publiée dans Le Grand
Journal en 1864. Dans celle-ci, il évoque la parution
de La main du défunt et déclare: «Comme
cette suite est exécrable, j’ai par le monde une foule
d’amis qui soutiennent, tout bas, bien entendu, que cette suite
est de moi. A l’époque où l’ouvrage a paru,
j’ai protesté dans tous les journaux, ou à peu
près; mais je ne vous apprendrai rien de nouveau en vous disant
que les amis lisent toujours les accusations, jamais les protestations».
Quand Dumas s'en prend à La main du défunt dans Le Monte-Cristo Dumas a parlé au moins deux fois de La main du défunt dans son journal Le Monte-Cristo «publié et rédigé par Alexandre Dumas, seul». Voici ces deux textes, avec reproduction de la typographie d’origine. Le Monte-Cristo, 1ère année, n°5, jeudi 21 mai 1857 On nous demande aussi, si un livre en huit ou dix volumes intitulé LA MAIN DU DÉFUNT, circulant dans les cabinets littéraires comme la suite DU COMTE DE MONTE-CRISTO et sous le nom de M. LE PRINCE, est de nous. Nous ne connaissons pas le forban littéraire qui vogue sous notre pavillon, et nous croyons que si notre correspondant anonyme avait lu la première page DE LA MAIN DU DÉFUNT, il aurait pu de lui-même et sans recourir à nous, donner un démenti au libraire qui lui a dit que le livre était de M. Dumas, mais que M. Dumas prenait un pseudonyme pour échapper à ses traites avec ses éditeurs. Si notre correspondant anonyme voulait nous faire un plaisir, ce serait de nous donner le nom du libraire qui a de la probité littéraire de M. Dumas une si haute opinion. Qu’on mette mes livres sur le compte des autres, soit; mais qu’on mette les livres des autres sur mon compte, non. ALEX. DUMAS. Le Monte-Cristo, 1ère année, n°22, jeudi 17 septembre 1857 Chers lecteurs, (…) Une dame ou une demoiselle Marie, l’état social n’y fait rien, m’écrit pour me dire qu’elle est une de mes lectrices les plus passionnées, qu’elle lit tout ce que j’écris, et que je suis pour elle le Dieu de la littérature. Vous voyez, voilà qui débute bien. Je me passais déjà la langue sur les lèvres et je trouvais que Mlle ou Mme Marie avait un goût littéraire auquel il n’y avait rien à reprendre. Aussi continuai-je. Le second paragraphe de la lettre parachevait assez bien le premier. C’était un éloge du roman le Monte-Cristo, c’était l’attente anxieuse avec laquelle Mme ou Mlle Marie avait, pendant treize ans, regardé l’horizon pour voir reparaître le yacht disparu; c’était enfin la joie de ma naïve correspondante en entendant dire que le susdit yacht venait d’aborder en France, rapportant avec lui cette fin tant attendue. Pour le reste, je laisse parler Mme ou Mlle Marie : « Je me suis empressée, dit-elle, d’aller chez mon libraire, retenir ma place pour achever de lire ces grandes aventures. » Mais quelle horrible déception: la suite n’est pas de vous, mais d’un nommé Leprince, qui, je crois, n’a pas trouvé son nom ni son blason, s’il en a un, dans la hiérarchie de l’esprit. Son style est trop em-poulé, et, cher Dumas père, j‘ai l’honneur de vous prévenir que je ne les aime que rôti.» Que n’aimez-vous que rôti, chère madame ou chère mademoiselle Marie? Si la construction de votre phrase pouvait me le laisser deviner, je tâcherais de vous envoyer la chose, afin que votre fruit ne fût pas comme votre lettre, tâché d’un non-sens. Continuons de lire la lettre de Mme ou Mlle Marie. « Bref, M. Leprince s’est mis, dans son héros, tout à fait en contradiction avec votre ouvrage, ce que je ne peux lui pardonner. » A l’avenir, cher auteur, avant de confier la fin de vos romans à des confrères, choisissez-les bien, et sachez si leurs pensées et leurs mains sont assez habiles pour conduire celles d’un défunt. » Car je ne suis pas comme votre fils, je lis vos ouvrages, moi! et vous ??» Vous voyez que si cela pèche par l’orthographe, c’est au moins charmant d’esprit et délicat de formes. Eh! non, Mme ou Mlle Marie, vous ne lisez pas tout ce que j’écris, et je le regrette, cette lecture d’abord eût pu corriger chez vous certaines tournures de phrase dont on peut attaquer la correction. Puis vous auriez vu, chère Mlle ou chère Mme Marie, car enfin, puisque je suis votre cher auteur et votre cher Dumas père, vous pouvez bien m’être chère aussi à moi, - puis, vous auriez vu que dans ce même journal, où j’ai l’honneur de vous répondre, je me plaignais amèrement de ce qu’un pirate nommé Leprince, embusqué dans la rade de Lisbonne, avait couru sus au yacht dont vous parlez, l’avait capturé et l’avait fait reparaître sous faux pavillon. Il ne me manquait plus, après avoir été pillé, dévalisé, conduit en esclavage par un forban, que d’entendre votre voix doucereuse me dire: que ce forban est de mes amis, et que vous me conseillez à l’avenir de mieux choisir mes amis. Si vous n’avez que ce conseil à me donner, chère Mme ou chère Mlle Marie, convenez que vous eussiez aussi bien fait de me lire au lieu de lire M. Leprince. Disons en passant que j’ai voulu faire saisir M. Leprince, mais que la justice s’y est obstinément refusée, en disant que c’était un pirate, c’est vrai, mais qu’il avait des lettres de marque. Si la justice n’était pas une dame si sérieuse, nous l’accuserions de s’être permis, à l’endroit de M. Leprince, un affreux calembour. |
Dumas a eu beau protester, rien n’y a fait: La main du
défunt a continué à être publié
et réédité dans le monde entier sous son nom.
Au point qu’aujourd’hui encore, notamment en Espagne et
en Amérique latine, il se trouve nombre de lecteurs à
être persuadés que le livre est bien de lui !
Grandes lignes du récit
L’action commence à Paris, où l’on retrouve
différents personnages du Comte de Monte-Cristo. Lucien
Debray est devenu ministre de l’Intérieur, le journaliste
Beauchamp, bizarrement, a remplacé Villefort comme procureur
du Roi. La baronne Danglars vit seule dans la capitale, son mari ayant
disparu et sa fille étant partie avec Louise d’Armilly.
Par l’intermédiaire de Beauchamp, elle envoie un secours
financier à son fils Benedetto, au bagne. Il s’en sert
pour s’enfuir et se rend dans le tombeau de son père.
Bien que celui-ci ait voulu le tuer à sa naissance, il jure
de le venger de celui qui a causé sa perte et celle de toute
sa famille: le comte de Monte-Cristo. Il coupe la main du cadavre
et l’emporte en symbole de la vengeance à venir.
L’action se déplace à Rome où se retrouve,
sans le savoir, toute la famille Danglars. Le baron, ruiné,
est portier d’un théâtre. Eugénie et Louise
font leurs débuts de chanteuses d’opéra. La baronne
s’installe dans la ville. Benedetto complote. Intrigues compliquées
entre tout le monde. La baronne, scandalisée de voir sa fille
chanteuse, veut la faire enlever puis renonce. Le baron cherche à
se réconcilier avec sa femme, qui a encore de la fortune. Benedetto
dépouille celle-ci.
Benedetto se fait passer pour le secrétaire du comte de Monte-Cristo
et rallie à lui les hommes de Luigi Vampa. Celui-ci devient
amoureux fou d’Eugénie Danglars et tombe dans un piège
tendu par Benedetto qui lui vole son argent et le livre à la
police. Benedetto part en bateau, ayant engagé Danglars comme
acolyte. Mais le bateau est pris dans la tempête. Benedetto
éprouve une révélation mystique. Il devient homme
de Dieu, répandant le bonne parole et la charité autour
de lui – sauf en ce qui concerne le comte de Monte-Cristo, qu’il
est chargé par Dieu de punir de son orgueil.
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Edition italienne de 1872 signée à la fois des noms de Dumas et Le Prince |
Pendant la tempête, durant laquelle Danglars se noie, Benedetto sauve aussi un naufragé qui se révèle être Albert de Morcerf. Ils arrivent à Marseille juste à temps pour sauver Mercédès qui, totalement ruinée, allait mourir de faim. Benedetto leur fait don de 1,5 million.
Venise: Maximilien et Valentine Morrel y séjournent. Valentine est prise de crises d’angoisse à l’idée que la fortune que leur a léguée le comte de Monte-Cristo est mal acquise : elle veut en faire don aux pauvres. Ils sont espionnés par Benedetto, qui a la même idée. Benedetto localise l’île de Monte-Cristo, y va, la vide de ses richesses et la détruit au moment où les Morrel y arrivent.
De nouveau à Venise: on y voit arriver le comte de Monte-Cristo (qui n’apparaît ainsi en personne qu’aux deux tiers du roman), sa femme Haydée et leur fils bébé. Déguisé en bohémien, Benedetto leur dit la bonne aventure et les convainc d’amener l’enfant à un «déjeuner de pauvres». Là, l’enfant est enlevé. Un message prévient Monte-Cristo de se rendre dans l’île du même nom. Durant sa traversée de l’Italie du Nord, chaque maison où il fait étape brûle. Monte-Cristo acquiert ainsi la réputation d’un incendiaire, plus personne ne veut l’héberger, tout le monde le fuit avec horreur.
A leur arrivée sur l’île, Benedetto capture Haydée et ne la rend à Monte-Cristo qu’en échange de toute sa fortune. Son fils ne lui sera jamais rendu, le prévient-il. Haydée se suicide, Monte-Cristo se rate. Benedetto confie anonymement le bébé au couple Morrel, qui a aussi recueilli le fils caché d’Eugénie Danglars et Vampa.
Gravure de l'édition italienne reproduite sur feuillet à part. Ici: la baronne Danglars |
La fin du livre est une hécatombe. Vampa est exécuté. Benedetto aussi, et sa mère, la baronne Danglars, meurt de chagrin. Mercédès meurt à Marseille, avec Monte-Cristo comme confesseur. Au moment de l’enterrement de Mercédès, Monte-Cristo tombe mort dans sa tombe.
Bouquet final : quelque temps plus tard, Albert de Morcerf, les Morrel et leurs deux fils adoptifs se trouvent par hasard sur le même bateau en partance pour l’Algérie. Le bateau coule : ils meurent tous. Seuls restants vivants, à la fin du récit, Eugénie Danglars et son amie Louise.
Commentaire
Dumas, on l’a vu, jugeait cette suite «exécrable». Le terme est fort, mais le jugement n’est pas sans fondement. Car cet épais roman qu’est La main du défunt - l’édition en notre possession ne compte que 256 pages, mais il s’agit de pages grand format, imprimées tout petit sur deux colonnes - est loin d’être une réussite. On y trouve d’abord une accumulation de coïncidences, d’invraisemblances et de péripéties ébauchées et jamais achevées caractéristique des feuilletons bon marché.
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Gravure de l'édition italienne reproduite sur feuillet à part |
Plus grave, c’est la démarche même de l’auteur qui est éminemment contestable. Hogan a semble-t-il fait du Comte de Monte-Cristo une lecture marquée par des convictions catholiques traditionnelles. La métamorphose d’Edmond Dantès en un être tout puissant, richissime et omniscient, aux pouvoirs quasi-divins l’a scandalisé. Et plus encore le fait que le comte de Monte-Cristo mette ses moyens exceptionnels au service de la vengeance. D’où le thème omni présent de La main du défunt: Monte-Cristo a gravement offensé Dieu en usurpant ses prérogatives et en oubliant la vertu chrétienne du pardon, il doit donc en être châtié.
Le problème, c’est que pour soutenir cette thèse, Hogan utilise les personnages de Dumas totalement à rebours de leur personnalité d’origine. La métamorphose de Benedetto en homme de Dieu n’est pas crédible une seconde. L’hostilité universelle que soulève Monte-Cristo dans La main du défunt pas davantage: imaginer que les Morrel eux-mêmes, qui lui doivent tout, en arrivent à rejeter leur bienfaiteur est un non-sens. Bien plus: la personne même de Monte-Cristo, quand elle apparaît enfin dans le roman, n’a plus rien à voir avec le héros de Dumas. Le comte de Monte-Cristo d’Hogan est un être falot, jouet des événements, tombant dans les pièges les plus grossiers de Benedetto et incapable de réagir. Une impuissance à laquelle il n’est donné aucun semblant d’explication.
La discordance est telle entre le roman de Hogan et celui de Dumas qu’il s’est trouvé des lecteurs pour s’en plaindre. Vers la fin du XIXème siècle, ainsi, l’éditeur portugais Nunes de Carvalho publie une nouvelle version de La main du défunt. Dans sa préface, il explique que le début de la publication de l’ouvrage a suscité de nombreuses réactions hostiles. «La première version de A mão do finado, écrit-il, était chargée d’une telle haine envers Monte-Cristo, qu’elle cherchait plus à détruire qu’à compléter, que nous nous sommes décidés à en faire faire une nouvelle version s’approchant davantage de la pensée de l’auteur du Comte de Monte-Cristo». D’où une version réécrite de La main du défunt dotée d’un «happy end»…
Le contraste entre l’échec de cette tentative de relecture
de Monte-Cristo avec la réussite que constitue, quelques années
plus tard, celle de Jules Lermina avec Le fils de Monte-Cristo
est frappant. Reste que les similitudes entre les deux livres sont
suffisamment fortes pour que l’on puisse avancer l’hypothèse
selon laquelle Lermina aurait pris quelques idées chez Hogan
avant de bâtir sa propre version de Monte-Cristo, beaucoup plus
cohérente (voir notre article sur Le
fils de Monte-Cristo). Le livre de Lermina ayant lui-même
inspiré de nombreuses autres suites, Hogan aurait ainsi contribué
à l’édification du corpus des livres dérivés
du chef d’œuvre de Dumas. Ce qui n’est pas si mal…
Voir également l'article sur Le Seigneur du Monde, roman allemand publié peu après La main du défunt et qui présente quelques similarités avec ce dernier.
Un grand merci à Nuno Ponces pour ses nombreuses informations sur les origines de A mão do finado et ses documents sur les éditions portugaises du livre.
Notons que le roman a fait l'objet d'une adaptation en bande dessinée au Mexique.
Voir l'arbre généalogique du comte de Monte-Cristo |
Extrait du chapitre 56 La hermana de San Lazaro
— ¡Benedetto, Benedetto!. . . — repitió la señora Danglars con terror — ¡Oh! ¡Decidme, por Dios, lo que hace aquel desgraciado!…
Una risa indefinible resonó entre la capucha de lana que cubría el rostro de Edmundo. Risa sarcástica.
— Lo que hace, tal vez yo no lo adivine: lo que hizo, puedo deciroslo:
"Maldecido por todos, lanzado a la muerte y al infierno desde su nacimiento, y salvado milagrosamente por un brazo que se vengaba concibió después un pensamiento fatal de destrucción. Encontrado por un hombre que caminaba ciego de orgullo y de vanidad, Benedetto fué el último que bajo los pies de ese hombre se convirtió en montaña, y que después se conminó y abrió para tragarlo en su abismo. Ese hombre a quien él aniquiló... ¿lo creeréis, señora?, fué el hombre mas poderoso que se ha visto en la tierra: fué el hombre cuya voluntad no encontraba obstáculos, y que, a la manera de un Dios omnipotente, quiso extender su diestra y vengarse del crimen sin piedad. ¡Ah! Pero ese hombre se engañó... El procuraba vengarse sin dolor y sin misericordia. Fué, por fin, el conde de Monte-Cristo. Sí —continuó Edmundo—, Benedetto aniquiló a aquel atrevido coloso, que los hombres contemplaron con asombro asi como el sencillo David derribó a aquel fiero Goliat de la Escritura… ¡Sangre y lágrimas! He aquí lo que Benedetto dejó en su paso frente a frente con el conde de Monte-Cristo; arrancándole con su mano homicida y vengadora sus mas caras afecciones. . .
"Benedetto fué el instrumento de Dios y ahora se halla en Francia próximo a recibir el público castigo de sus pasados crímenes. He aquí, baronesa Danglars, la obra de vuestro hijo.
Dicho esto, Edmundo bajó la capucha de su hábito, y la señora Danglars, lanzando un grito de horror, fué a caer de rodillas junto a la cama en que estaba Bertuccio agonizante.
— Sí: es ahí — continuó Edmundo —, es ahí donde podéis ver al hombre a quien vuestro hijo debe la vida. Este infeliz fué el que lo sacó de la cueva en que Villefort lo había enterrado vivo . . .
—¡ Piedad !… ¡ Señor, piedad!
— ¿ Sabéis cómo recompensó Benedetto después a ese hombre generoso? Pues asesinandole la hermana, incendiándole la habitación y robandole completamente. ¡ Ah! Es porque era maldito de Dios y de los hombres... Vamos, señora, sabed que vuestro hijo os busca para pediros la bendición maternal; id a encontrarlo y a concedérsela, para que pueda morir en paz: de este modo quedara más tranquila vuestra consciencia, ente Dios y el mundo.