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La jeunesse de d’Artagnan

J. Jacquin

6 pages
Mon Journal - 1896 - France
Nouvelle

Intérêt: *

 

 

 

Cette nouvelle a été publiée dans Mon journal, recueil hebdomadaire illustré pour les enfants de 8 à 12 ans en date du 20 juin 1896. Elle a ensuite été reprise dans L’Echo d’Alger en deux parties, dans les numéros des 12 et 19 juin 1924. Elle raconte un épisode de la jeunesse d’un d’Artagnan qui est très bizarrement prénommé Jacques Onfroy, prénom qui ne correspond ni au d’Artagnan de Dumas (qui n’en a pas), ni au d’Artagnan historique, prénommé Charles. On pourrait du coup s’interroger sur l’inclusion de ce texte dans pastichesdumas. Mais plusieurs éléments incitent à penser qu’il s’agit bien là malgré tout de « notre » d’Artagnan : ce Jacques est né, est-il précisé, en 1607, ce qui correspond à la date de naissance du personnage de Dumas (et non à celle du d’Artagnan historique, né vers 1613/1615) ; en outre, il est affirmé à la fin de la nouvelle que son jeune héros deviendra maréchal de France quarante ans plus tard, comme les d’Artagnan historique et dumasien. On peut donc considérer que ce texte fait bien partie de l’histoire imaginaire de d’Artagnan – sans que soit levé le mystère de ce prénom Jacques Onfroy.

 
Ce court récit décrit d’abord la rivalité ancestrale qui oppose la famille d’Artagnan à celle des seigneurs de Pouyastruc, voisins de leur fief du Béarn. Les Pouyastruc, comme il se doit, sont riches, puissants et détestés par tout le monde, les d’Artagnan étant quasiment ruinés mais bons et adorés par la population.
Mon Journal, 20 juin 1896

La haine entre les deux familles se retrouve entre les deux jeunes héritiers : Jacques d’Artagnan d’une part et Henri de Pouyastruc, son contemporain « malingre, orgueilleux et méchant ». L’histoire commence quand d’Artagnan et son compagnon Jeannot, petit paysan du même âge, mi ami intime mi serviteur, cherchent à mettre la main sur une nichée de fauconneaux qui se situent sur les terres des Pouyastuc. Mais alors que les deux adolescents sont en haut de la paroi rocheuse où se trouvent les oiseaux, Henri de Pouyastruc, son écuyer Bernac et son maître d’armes italien Pancrazio les surprennent et leur bloquent toute voie de retrait.

Mon Journal, 20 juin 1896
 
Assiégés par trois adversaires dont deux hommes mûrs, les deux adolescents sont en mauvaise posture. Mais quand l’écuyer s’en va chercher du ravitaillement, d’Artagnan et son compagnon descendent de la paroi rocheuse. Jeannot ligote le pathétique Henri tandis que d’Artagnan défait sans problème à l’épée le maître d’armes professionnel. A son retour, l’écuyer est capturé lui aussi. D’Artagnan peut alors amener ses trois prisonniers triomphalement dans son château pour la plus grande humiliation des Pouyastruc (voir extrait ci-dessous).

Sans prétention et joliment écrite, cette nouvelle toute simple s’inscrit bien dans la tradition des textes imaginant des anecdotes de jeunesse témoignant déjà de la grandeur à venir du futur mousquetaire.

Merci à Mihai-Bogdan Ciuca de m'avoir signalé ce texte.

Extrait

 L'arrivée au castel de d'Artagnan fut triomphale. Parvenu dans la cour d'honneur, il rangea à droite — côté des chouettes —Henri de Pouyastruc, Pancrazio et le sieur Bernac, et, ayant assemblé les paysans et les serviteurs, il se plaça sur le perron de gauche.

« Messire de Pouyasturc, dit-il, vous avez un manoir crénelé aux tours puissantes, aux murs inébranlables : notre castel tombe en ruines, vous avez des terres immenses : nos récoltes nous nourrissent à peine. La fortune vous sourit, et cependant vous avez le cœur lâche, puisque vous me faites attaquer par deux hommes d'armes, moi, un enfant; et cependant vous avez l'âme basse, puisqu'un jour ne se passe sans que vous nous railliez méchamment. Souvenez-vous donc de ces mots : Si désormais, vous ou quelqu'un des vôtres, par calomnie ou violence, touche au nom de d'Artagnan, foi de gentilhomme, j'irai prendre le haut baron de Pouyastruc, votre père, derrière ses murailles, jusque dans son donjon, et je le ferai pendre connue un manant !

L’Echo d’Alger
juin 1924

— C'est qu'il en est capable, lé pétit ! murmurait Pancrazio, conquis par cette bravoure.

— Maintenant, détachez-les, et renvoyez-les ! » dit Jacques.

Henri, brisé dans son orgueil, pleurait de rage ; il s'enfuit en courant pour cacher plus tôt sa honte d'être bafoué ; de loin, l'écuyer et le maître d'armes suivaient mélancoliquement.

Quand ils furent hors de vue, M. d'Artagnan, qui avait assisté à cette scène, ouvrait les bras à son fils :

« Jacques-Onfroy, s'écria-t-il, tu seras maréchal de France! »

Quarante ans plus tard, cette prédiction se réalisait.


 

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